Caractérisée par une abondante et brillante production manuscrite dont les premiers témoins datent du VIe siècle, la culture arménienne adopte les techniques typographiques au début du XVIe siècle. Le premier livre imprimé en arménien parait à Venise en 1512 ; il est l’œuvre d’un personnage encore énigmatique, qui publie cinq livres avant de disparaitre sans laisser de trace…

L’histoire du livre arménien, de sa production à sa réception, est ici illustrée par un ensemble méconnu d’ouvrages rares et précieux. Ils rendent compte de la géographie à la fois large et éclatée de l’imprimerie arménienne des premiers siècles (Venise, Rome, Constantinople, Amsterdam, Marseille, Madras…), et des conditions souvent difficiles dans lesquelles ont œuvré les hommes du livre de la diaspora arménienne, qu’ils fussent imprimeurs, éditeurs, mécènes, graveurs ou relieurs. Une attention particulière est portée aux répertoires privilégiés de l’édition ancienne (grammaire et alphabets, textes sacrés, histoire), à ses particularités ornementales (lettrines en formes d’oiseaux, illustration combinant emprunts aux artistes européens et iconographie traditionnelle), aux reliures.

Au cœur des rivalités entre l’Église arménienne et Rome, expression des rapports ambigus entre langue classique et langue vernaculaire, vecteur identitaire d’une nation sans État dont les membres sillonnent le monde entier, le livre arménien apporte un éclairage fascinant sur les échanges intellectuels et techniques, politiques et commerciaux, entre l’Europe et l’Orient de la Renaissance aux Lumières.